Nova est une grand mère exemplaire. Elle sait se tenir, faire le ménage, préparer les repas et les gouters de ses petits enfants.


Nova a toujours vécu dans une autre époque. Elle porte encore aujourd’hui les traces laissées par l’éducation catholique, son père et ses nombreuses années passées avec un mari coincé dans son costume trois pièce.


Nova est restée la même après la mort de son mari. Calme, attachée à la maison et à ses taches quotidiennes. Prêtes à passer ses dernières années quasi-seule, avec son chien vieux lui aussi et ses petits enfants tous les week-end.


Nova n’a jamais eut d’occupation particulière. Son mari raconte souvent à quel point il regrettait le manque d’entrain de sa femme. Elle devait se sentir si seul, disait-il, mais elle le rassurait à chaque fois. Quelle dévotion.




Bien sur que Nova se sentait seule.


Bien sur que Nova s’ennuyait.





Nova est une femme est née cinquante ans trop tôt. Elle déteste son histoire, son père, sa mère, son éducation, les moeurs de l’époque. Elle déteste les carcans, les cases dans lesquels les gens vous mettent pour que vous ne bousculiez pas leur petite vision du monde.

Nova a toujours voulu faire du sport. Nova a toujours voulu voyager. Nova a toujours voulu prouver au monde qu’elle était plus que ce qu’elle se forçait à être.

Nova a trop de regret pour tous les lister.

Mamie Nova est une enfant dans un corps périmé, pas étonnant qu’elle se soit toujours senti plus proche de ses petits enfants que de son mari. Au moins eux peuvent être ce qu’ils veulent. Les cases de son époques ont disparu pour laisser place à d’autres, mais qu’est-ce qu’elle ne donnerait pas pour une nouvelle chance à cette époque.

Mais Nova n’est pas dans le dénis total. Elle sait qu’elle est vieille, elle sait que son corps lui pèse même si elle en prend soin, persuadé que la jeunesse est tout de même un état d’esprit. Elle sait tirer profit du passé, des leçons qu’elle a apprises, de son expérience. Aider les jeunes à s’affirmer lui permet de se sentir mieux.

Mais il y a quelque chose qui lui plait encore plus.

Écraser un petit arrogant qui pense que les gens du troisième âge est pas capable de se défendre à son jeu de 2000.

Parce qu’Hélène Sugar est intelligente. Elle n’a peut-être pas l’intellect d’un doctorants en physique nucléaire. Non, Nova comprend vite. Elle s’adapte. Elle progresse à une vitesse prodigieuse lorsqu’elle se plonge dans un domaine. Elle n’est peut-être pas capable de devenir numéro un, mais donnez lui une semaine et elle vous aura poncé toutes les stratégies.

Elle aurait pu être une femme forte comme on en fait aujourd’hui mais son corps ne suit plus. Ça l’énerve à un point, vous ne pouvez pas imaginer. Croire qu’elle ne peut pas prouver qu’elle est meilleure que les autres parce que ses mains ne suivent pas le rythme la met hors d’elle.

La compétition est ce qui l’a fait vivre pendant quelques mois et elle ne veut pas arrêter. Cette vie était tellement plus agréable que les soixante années précédentes.

Vous ne pouvez pas non plus imaginer à quel point elle est contente d’être à New-Life.

Une promesse de seconde vie et en attendant un terrain de jeu ou tout ce qu’on demande c’est de se plier au règle.

Finit cette arthrite qui lui paralysait la main gauche. Finit les rhumatismes à cause de l’humidité. Son corps n’a peut-être pas vingt ans mais elle a l’impression d’en avoir au moins dix de moins.

Gagner est synonyme de jolie promesse, mais elle n’a peut-être pas envie de quitter ce paradis.

Mais elle est consciente que dans toutes les compétitions il y a des gagnants et des perdants. Et si elle hésite à devenir gagnante, elle n'est pas prête à perdre.

Nova est une petite vieille, elle ne paye pas de mine.

Pas bien grande, elle ne dépasse pas le mètre soixante. Sa peau striée par ces crevasses qu’on appelle ride pour faire joli est témoin du temps qui a passé. Pas bien épaisse non plus elle fait partie de ces grands mères qui font attention à garder un minimum d’activité. Elle a une peur bleue de s’assoir un jour sur son fauteuil et de se fossiliser dessus.

Pas question. Trois heures de natation, trois fois par semaine. C’est sur que ça n’est pas de la nage olympique mais ça maintient la machine en marche. Et puis qu’est-ce qu’elle est pas sexy en maillot de bain, rien ne dit qu’elle ne fait pas ça juste pour faire peur au gamin qui veulent profiter de la piscine. M’enfin, ça semble peut probable.

Son visage est animé par deux petits yeux pétillant et un nez proéminent. Son petit sourire en coin qui ne semble jamais disparaitre vient compléter un tableau espiègle d’un autre temps. On n’y fait pas forcément attention, il faut dire qu’elle se fond facilement dans le décors, mais ses yeux voyagent constamment.

Une seconde posés sur les habits d’une jeunes fille, tient, elle a mangé au fast food vu les taches de gras sur le rebord de son jean. La suivante fixés sur les cheveux absents d’un vieil homme, ses implants ont échoués.

En parlant de cheveux, les siens commençaient à tomber au moment de sa mort. Une calvitie tardive mais bon, elle finit forcément par arriver avec l’âge. Du coup elle attache ce qui lui reste de poil décoloré par le temps pour éviter de les perdre.

Par contre, une de ses grandes fierté est l’état de ses dents, il ne lui en manque pas une seule. Enfin, peut-être une ou deux, mais c’est tout. Et puis les dents de sagesse ça ne compte pas.

Parfois droite, parfois un peu vouté, Nova est souvent assez immobile. Enfin, disons qu’elle ne se perd pas trop en petit mouvement futiles. Elle a encore trop l’habitude des séquelles de l’âge disparues depuis qu’elle est arrivé à New-Life. Donc soit elle fait quelque chose, soit elle ne fait rien… avec son corps.

Son cerveau fonctionne souvent à haute allure, trop de détails à noter, trop d’informations à accumuler, tant de règles à découvrir.

D’ailleurs, grâce à cette nouvelle non-vie elle se redécouvre, elle se rend compte que son corps, même s’il n’est pas jeune, est dans un meilleur état. Peut-être la verra-t-on en train de faire un footing dans quelques semaine.

Pour finir, je vais pas parler de ses habitudes vestimentaire mais je vais vous donner deux trois conseil pour reconnaitre lorsqu’elle en colère. Détail numéro un : elle ne sourit plus, classique. Ensuite, elle se tient droite comme un piquet avec un air de défi dans les yeux. Enfin, elle parle comme ses parents qu’elle déteste pourtant.

Elle met bien en avant son âge pour imposer le respect avant de prendre ce que vous avez utilisé pour la mettre en rogne et le détruire en le démontant pièce par pièce. Que ça soit vos arguments ou votre estime personnelle.

« Hey Mamie, pourquoi tu m’aides ? On se connait pas. »
« Je t’ai déjà dit de ne pas m’appeler comme ça. »
« Ouais… ouais… mais tu réponds pas à ma question. »

Pourquoi ? Hélène n’en savait rien. Elle ne voulait pas savoir. Elle agissait juste. Elle avait ajouté sa soixante-et-unième bougie la veille, personne n’était venu. Ce n’était pas grave. Non. Pas grave. Elle en avait profité pour faire des courses, son frigo en avait bien besoin. Le soir, sur le chemin du retour avec son sac un peu trop lourd elle l’avait vu. Il avait quoi ? Vingt ans ? Plus ? Moins ? Elle n’en savait rien. Elle ne voulait pas savoir. Elle avait juste agit. Donner un toit à un sans abri, au moins pour un soir. C’était une simple bonne action, rien qui ne changeait une vie.

———————————————————————————————————————————

« Tu m’expliques ce que t’es en train de faire ? »
« Mes valises. »
« Et où est-ce que tu vas ? »

Une semaine. Une simple semaine qu’elle hébergeait Josh et elle était déjà résolue. Une semaine et elle avait appris ce qu’il y avait à savoir à propos de ce jeune. Elle savait qu’il n’avait nul part ou aller. Que personne ne l’attendait ou que du moins, il n’attendait personne. Il avait fait tant de chose en peu de temps, tant de remord accumulés. Tout le contraire d’Hélène. Elle voulait savoir ce que ça faisait de vivre sans se poser de question. Faire les choses et se dire seulement après qu’il fallait réfléchir. Une semaine et elle prenait une lourde décision. Son fils, ses petits enfants, ses voisins. Elle était désolé mais elle en avait marre, un sentiment pareil à un vague qui s’était préparée pendant toutes ces années. Ils partaient.

———————————————————————————————————————————

« Maman où es-tu ? Ça fait deux jours que tu as disparu ! »
« Là ? Je suis à Atlanta. »
« Mais tu es complètement fol… »

Hélène raccrocha le téléphone. Son fils avait toujours été du genre nerveux. Ce n’était pas parce qu’elle partait du jour au lendemain à l’autre bout du monde qu’elle n’était pas prête. Elle avait retiré ses quelques économies, mis ses affaires dans une valise et prit deux billet pour le premier vol vers les states. Il parait que c’est là bas qu’il y a le plus de chose à voir selon Josh. D’ailleurs, en parlant de lui il n’était que quelques mètres derrière, en train de tirer la valise de la grand mère qui lui avait payé sa liberté. Il se demandait certainement encore pourquoi il la suivait mais lui qui avait toujours agit sur un coup de tête devait trouver le cas d’Hélène assez amusant. Assez pour qu’il oublie lui aussi ce qu’il laissait derrière.

———————————————————————————————————————————

« Tout va bien Hélène ? »
« Mh… oui. Ne t’inquiète pas… »
« On va quand même faire une pause, d’accord ? »

Les voyages, les hôtels, les valises, les repas sortis des super marché. Cela faisait plusieurs mois que ça durait et Josh était toujours là. Hélène ne savait pas pourquoi, mais « pourquoi ? » n’était plus vraiment une question qu’elle se posait. Il s’occupait d’elle en enchainant les petits boulots pour payer la nourriture et les chambres d’hôtel, ils ne pouvaient pas vivre sur les économies d’Hélène pour toujours. Pendant ce temps, la grand mère découvrait de nouvelles activités. De jeux, des épreuves, des disciplines, sans prise de tête et dieu qu’elle était talentueuse. Pour une personne du troisième âge.

———————————————————————————————————————————

« Alors ?! Qu’est-ce que tu dis maintenant espèce de petit c…*cof cof* »
« Du calme Hélène, il a perdu de toute façon. »
« … Évidemment qu’il a perdu ! Je lui apprendrai moi ! »

Mais c’était déjà fait. Elle venait de mettre une dérouillée à un jeune un peu trop confiant sur une borne d’arcade pendant qu’elle s’évertuait à inscrire son nom dans le tableau des scores. Tout en haut. Elle passait tellement de temps à changer d’un jeu à l’autre, tandis l’arcade, tantôt les jeux de plateau, parfois les cartes, parfois la stratégie pure. Tout y passait. Elle s’était acheté un carnet dans lequel elle notait des moyens de s’améliorer lorsqu’elle ne pratiquait pas. Mais ce style de vie n’était clairement pas sain et certainement pas pour une femme affaiblie par l’âge. Josh était toujours là, il était son seul ilot de stabilité dans cette vie pour le moins décadente. Il avait gagné en maturité, en responsabilité. Il était propre sur lui et gérait la vie d’Hélène pour qu’elle reste saine même s’il la voyait se perdre un peu plus chaque jour. Et perdre le souffle.

———————————————————————————————————————————

« Hey ? HEY ! Hélène ?! »
« … »
« Vite ! Appelez le 911 ! »

Elle n’avait plus la force de parler, plus assez d’air non plus. Tout semblait ralentir autour d’elle. Pas vraiment de douleur, elle avait simplement l’impression que ses sens s’éteignaient. Le sons devenaient lointains, les détails flous et ses doigts froids. Tout ce qu’elle parvenait encore à discernait était la silhouette de Josh penché au dessus d’elle. C’est drôle, elle avait l’impression qu’il avait grandit depuis leur première rencontre, pourtant elle ne datait pas tant que ça… Ah, peut-être bien que si. Ses souvenirs étaient confus mais après quelques secondes de concentration elle se souvint. C’est vrai qu’il s’en était passé des choses depuis leur première rencontre.

Elle n’avait plus la force de parler, plus assez d’air non plus mais elle pouvait tout de même bouger les lèvres. Juste assez pour offrir un dernier merci.

———————————————————————————————————————————

« Du coup, tu veux changer d’apparence ? »
« Non… »
« Okay… et pour ton pseudo ? Ah, t’es trop vieille pour savoir ce qu… »

Le regard de la vieille femme se perdit dans la faune du bar dans lequel elle avait atterrit. Elle ne comprenait pas vraiment ce qu’il se passait. Enfin, si, le petit bonhomme lui avait expliqué les grandes lignes mais elle avait du mal à digérer l’information. Ça semblait tellement… surréel ? Inattendu ? Parfait ? Elle ne savait pas vraiment ce que la plupart des gens ressentait à ce moment là. De la peur peut-être ? De l’appréhension avec ces histoires d’épreuve et de sanction ? De l’espoir avec cette promesse de nouvelle vie ? Elle, était juste heureuse. Elle attrapa son verre avec la main gauche, ses doigts tremblaient un peu. Ils n’avaient plus servit depuis si longtemps et…

« Alors ? J’ai du boulot tu sais. »

Ah ? Oui, le pseudonyme. Rien de plus simple. Après tout cela faisait longtemps qu’elle ne s’appelait plus Hélène sur les registres des scores.

« Nova. »

« Ah… c’est cool comme pseudo… ça fait… »

« Comme Mamie Nova. »