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Ruines. | Raven.
(Jeu 27 Mar - 0:38)
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Ruines.
Et voilà. C'est arrivé comme ça.
La seule barrière encore capable de supporter son poids. Un incendie, à n'en pas douter. Les cendres étaient encore chaudes, il le sentait. Évidence traître. Il aurait cru pouvoir fuir le feu mais ses pas le guidaient vers lui, comme une traction nécessaire. La douceur d'un foyer. Ce monde était froid, et s'il l'appréciait à sa juste valeur, Fauve était un enfant du sable. Un de ces gamins qui courraient dans les rues bombardées, inconscients, déjà grands. Sans doute un peu trop pour se cacher sous les voitures, il leur fallait combattre. Et il était là.

L'aire. Il avait entendu toutes sortes de rumeurs à son sujet, n'y croyait pas un instant. Bien qu'il eut été contraint de concevoir l'existence d'âmes en perdition, errantes, lorsqu'il se rendit compte que personne d'autre que les morts ne pouvaient le voir. La mémoire encore fraîche, mais ce n'était rien. Pas très important. Sa curiosité en revanche semblait être mise à rude épreuve, et il conclut de l'absence de souvenirs la concernant qu'il n'avait jamais mit les pieds ici. À raison sans doute, c'était bien trop sordide à son goût. Au goût de n'importe qui.
Il regardait ses pieds se balancer sans trop savoir quoi faire, releva la tête après avoir entendu quelque chose. La ruine de son bras vint chercher d'un coup d'épaule la ruine de sa joue, comme pour essuyer une larme qu'il n'y avait pas. Sauta de son assise et garda les jambes ancrées dans le sol. Le regard mauvais et l'instinct vif. Il ne voulait pas être vu. Il ne voulait pas être dérangé. Il aurait aimé avoir un instant à lui, retiré loin du monde, et la brûlure était son élément. Son foyer, et son aimée. Il l'embrassait à pleine bouche quand il n'y avait qu'elle, il la cherchait même sans la vouloir à ses côtés. La balançoire grinçait à ses côtés, à peine une brise contre le tissu de son haut, un grincement qui stria ses tympans et lui tira une moue contrariée. Un soupir.

Puis il eut envie d'aller la pousser alors qu'elle était vide, ce qu'il fit. Enroula la chaîne autour de ses doigts, l'aida à peine, la vit onduler lourdement. L'accompagna sans rechigner, perdu dans ses pensées. Son gémissement plaintif devenu gazouillement guilleret à ses oreilles, et un sourire s'échappa sans trop qu'il sache pourquoi. Comme ça. À nouveau du bruit, et il eut la certitude de ne pas être seul, à son grand regret. Rictus disparu, effacé, et yeux ternes. Il faisait froid, il n'avait pas de veste, et il n'était pas seul. Sans rien arrêter de son occupation, il sentit la fraîcheur de la chaîne autour de sa main, laissa ses yeux glisser vers le tourniquet. Personne.

- Sors de ta cachette, imbécile.

Je sais que tu es là, et quitte à affronter le croque-mitaine, autant le faire décemment. Même les monstres ont un honneur.
Un peu.


Dernière édition par Fauve le Mer 23 Avr - 21:40, édité 1 fois
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Ruines. | Raven.
(Mer 23 Avr - 21:15)
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Silence.
Chose étrange, déconcertante au milieu d'une discussion, signe de concentration en plein devoir surveillé, apaisante après une colère. Inspiration, parfois, lorsque tout son, même la musique, devient lassante, ou blessante. Calme avant la tempête, souvent mauvais signe lorsqu'il s'installe dans un couple, ou dans un groupe. Certains l'aiment, car il est un compagnon de route inévitable. D'autres le haïssent, car il est trop fréquemment signe d'un mauvais tournant.

Ce silence, pour ma part, je le chéris autant que je le maudis. Il est mon fardeau depuis bien des années à présent, mais mon armure en même temps. Peut-être qu'un jour il s'en ira, peut-être qu'un jour j'entendrais à nouveau le son de ma voix. Peut-être qu'un jour les mots ne seront plus ma seule façon de m'exprimer, qu'un jour je pourrais de nouveau parler, crier, chanter. Les hommes en blancs disaient souvent que j'en était la cause, que pour parler il faudrait que je l'ose. Pourtant, moi, j'aimerais parler, ne pas être simplement condamnée à me taire et obéir, j'aimerais mais c'est indépendant de ma volonté. Alors, je m'y suis habituée, et peu à peu, j'ai terré cette envie quelque part, dans un coin de ma tête, en me disant que plus jamais je ne pourrais m'exprimer autrement qu'à travers un crayon et un morceau de papier arraché de mon bloc note.

Hantée, accompagnée par ce silence, j'avançais, en terrain inconnu, et pourtant pas tellement. Je me trouvais près d'une aire de jeux en ruines, qui n'avait pourtant de cesse de me rappeler celle de mon enfance. Je marchais au milieu des jeux démantelés, carbonisés, ou fondus, selon le matériaux dans lequel ils étaient fait ; effleurais parfois les restes noircis ou déformés, sans que rien ne bouge.

Et puis, un son retenti. Faible, étouffé, pourtant bien présent. Quelqu'un est là, tout près, trop peut-être même. Je l'aperçois alors, là bas, non loin. Je m'assied alors sur le bord des restes du tourniquet, qui laisse résonner un vieux grincement strident. Je me levai alors d'un coup, pour aller me cacher derrière les restes du toboggan, en profitant pour sortir mon bloc-notes et mon stylo, pour griffonner quelque chose, alors que la voix de l'inconnu portait jusqu'à ma cachette. Je pris une profonde inspiration, un courant glacial de peur s'écoulant un instant dans mes veines, avant que je ne fasse un pas de côté afin de me montrer, tendant juste la feuille arrachée en avant, tout en m'approchant prudemment.

« Excuse-moi, je ne suis pas là en tant qu'ennemie. Je prenais juste un peu de bon temps ici... Même si c'est peut-être un peu trop lugubre, au moins c'est calme. Désolée, si je te dérange. »

En même temps, je pris un petit air vraiment désolée, espérant juste qu'il n'était pas de ces violents qui n'hésitent pas à s'acharner sur de petits êtres sans défense tels que moi.



Bon bah, comme c'est libre, je rejoins, en espérant que ce soit encore d'actualité :')
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Ruines. | Raven.
(Ven 25 Avr - 14:41)
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Ruines.
Une enfant. Le monde était contre lui.
Tout était contre lui, et il soupira.
Éreinté. Il aurait voulu cracher, mais c'était sale. Et il n'avait plus suffisamment de salive pour s'adonner à pareil gaspillage. Il ne pensait pas avoir à rationner sa salive un jour, d'ailleurs, mais là n'était pas le propos. Une enfant était ici, joueuse de New-Life, comme lui. Il était aussi impuissant qu'elle. Aussi misérable. Un enfant, et sa narine se souleva nerveusement alors qu'il restait là, debout, sa branche unique enroulée dans la chaîne de la balancelle branlante, à la regarder. Petite et violette, silencieuse comme tout, à tel point que la feuille qu'elle brandissait devant elle en guise de bouclier était plus bavarde. Il allait devoir composer avec cela, ce n'était rien.
Il lut ce qu'elle avait écrit, supposait-il, en fronçant les sourcils et en approchant la tête. Il ne fallait pas être myope. Un souffle nerveux, toute sa hauteur retrouvée, la chaîne grinçante et légèrement chaude. Détourne le regard pour déglutir péniblement.

- Tu peux être désolée. Parce que tu me déranges.

Et il pensa à Jawal. Jawal qui, lui, aurait répliqué sur-le-champ. Ils étaient aussi bourrus l'un que l'autre, sans grande surprise. Ils avaient le même sang.
Pas important.
Il attendait une supplique ou un agacement, quelque chose de sonore parce que l'ouïe lui manquait. Il aurait aimé avoir à se servir davantage de ses oreilles et moins de ses souvenirs, moins du goût de sable dans sa bouche, du contact tempéré de sa peau contre tout ce qu'il touchait. Il aurait aimé pouvoir lui sommer de partir après qu'elle se soit manifestée, qu'elle se soit plaint, mais rien ne vint sinon le vide. Le silence. Et la désagréable sensation de la savoir pendue sur son corps mutilé, fascinée par la difformité, curieuse des créatures du monde. Curieuse de tout.

- Mais tu ne partiras pas. Parce que tu n'as pas à m'écouter.

Et peut-être qu'elle ne t'entend même pas. Il connaissait le langage des signes, il avait essayé d'apprendre le Braille, connaissait les tactiques et plans sonores des renégats et des résistants pendant les raids ou les attaques, il savait même écrire des messages codés. Mais elle n'en savait rien, il avait eu le temps d'oublier tout ce savoir, et ils étaient là, deux pauvres gamins perdus dans les pertes de leur ingénuité, aussi blessés l'un que l'autre. Rassurant.

- Tu ne parles pas.

Constatation purement matérielle. Il ne la lâcha pas du regard, s'écarta légèrement du siège de la balançoire sans pour autant la lui céder. Un bras suffisait pour pousser, et les chaînes étaient déjà trop bien encrées contre son derme pour pouvoir les y retirer. La chaleur d'un corps attire. Bien malgré lui.

- Assieds-toi.

Fais honneur à ton hôte.
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Ruines. | Raven.
(Ven 23 Mai - 19:15)
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Mes doigts se crispèrent sur la feuille que je tenais lorsqu'il répondit à ce que j'avais écrit. Devais-je vraiment être désolée de le déranger ? Ou pas ? Aucune idée. Mais après tout, le parc ne lui appartenait pas. Alors, certainement n'avais-je pas à l'être, puisque être ici était dans mes droits. J'haussais alors les épaules, pour signifier que certes je le dérangeais, mais que... tant pis. Je ne devais rien à personne, et encore moins à un inconnu.

Inconnu à l'apparence étrange, mais pas dérangeante à mes yeux. A vrai dire, c'était l'une des dernières choses que je regardais, chez les autres. On m'avait tellement jugée sur mon apparence, autrefois -d'ailleurs, ces souvenirs s'effaçaient déjà-, que moi-même j'étais incapable d'avoir un avis sur celle des autres. Alors, à la place, je m'en fichais, je passais outre. L'habit ne fait pas le moine. Les pires créatures se cachaient souvent derrière des airs angéliques pour mieux tromper leurs proies, et l'être au physique le plus repoussant pouvait parfaitement être le plus adorable et en manque affectif au monde. Il fallait juste le vouloir pour le remarquer. Et je faisais plutôt partie de ceux-là, ceux qui attendaient de voir ce qu'avaient les autres dans leur cœur avant de juger.

Il parla de nouveau, et j'hochais la tête. En effet, je ne partirais pas. J'esquissais un petit sourire en coin, m'approchant de quelques pas, accrochant mon stylo à mon bloc-note que je glissais sous mon bras. Nouvelles paroles qui brisaient le silence. Nouvelle constatation, à laquelle je ne pouvais qu'acquiescer encore. Je ne parlais pas. En effet.

Il m'invita à m'asseoir sur la balancoire, et j'hésitais, avant de rouvrir mon bloc note pour écrire tout juste quelques mots que je tournais vers lui.

« Qui me dit que tu n'es pas un tueur en série ? »

Pour autant, je m'avançais tout de même vers lui, pour répondre à son invitation et venir m'asseoir, faisant à moitié confiance à ce type inconnu, mais restant tout de même sur mes gardes. Prête à fuir, si besoin était.

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Ruines. | Raven.
(Jeu 29 Mai - 0:26)
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Ruines.
Il aurait pu rire si cela n'avait pas été aussi ridicule.
Non, en fait, il était bien trop blasé pour rire, et il se contenta de hausser un soucil en premier lieu. D'attendre un geste, un signe, qui vienne lui intimer qu'il s'agissait d'une plaisanterie. D'une plaisanterie qui n'était pas drôle, ni même blessante, elle était juste d'une idiotie astronomique et il attendait qu'elle l'avoue. Il attendait visiblement quelque chose qui ne viendrait jamais. Alors il garda en plus un soupir à fendre l'âme, pantois, consola sa joue dépitée d'un coup d'épaule. C'était une vraie question. Bien.
Il se pinça l'arrête du nez pour ne pas exploser. Cela relevait du miracle qu'il n'ait pas encore cédé, et il ne priait pas vraiment pour que cela dure. Il aurait aimé la renvoyer hors de sa vue pour sa débilité, et il avait beau savoir qu'elle n'était qu'une merdeuse Jawal, lui, n'aurait jamais posé une telle question. Et il avait sept ans. Il avait sept ans. Seigneur.
Non.
Pas de seigneur ici. Lui, lui, et lui seul. Son regard n'avait rien de compatissant.

- Yâ ḥmâr. Tu es morte. Qu'est-ce que cela peut bien te faire ?

Quel sens de la rhétorique, c'en était presque scandaleux.
Il n'en revenait toujours pas, se mordit la langue pour ne pas poursuivre. Du moins pas tout de suite. Il la vit hésiter, encore, perdit patience. Très vite.

- Je pourrais bien te tuer, tu reviendrais. Et tout ce que j'y gagnerais c'est mon nom sur le tableau de chasse des Dogs. Très sincèrement, tu me penses aussi idiot ? Metl el-'atrach bez-zaffé.

C'est sorti tout seul. Et il ne traduirait pas. L'avantage d'être à l'étranger, parmi d'autres étrangers. On pouvait dire ce qu'on voulait. Et il n'avait rencontré personne capable de comprendre le libanais en dix ans. Le monde était bien moins vaste qu'avant. Dommage. Les sourcils haussés, et les mots qui lui firent défaut un instant. Parce qu'il n'y avait rien à répondre. Si, l'envoyer bouler. Correctement. Et c'est la décence qui lui interdit de le faire. Peut-être plus que la pitié, et pourtant elle était grande.

- Tu es au courant ? Le jeu, la vie, la mort... ?

Parce que je ne t'expliquerais pas.
Sa main, paume vers le ciel. Sa nuque penchée vers l'arrière, un souffle impatient et rude. Heureusement qu'il avait la chaîne à attraper et à broyer, sinon c'était son cou qu'il serait allé chercher pour se calmer.

- Et si je ne suis pas assez bien pour toi tu peux aller voir ailleurs, rien ne te retiens.
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Ruines. | Raven.
(Mar 1 Juil - 19:42)
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Morte. J'avais quelques peu oublié ce détail. J'étais morte. Donc, en effet, logiquement, on ne peut pas mourir plus d'une fois. A la limite, je souffrirais peut-être ? Ressentait-on la douleur, ici ? La meilleure façon de le savoir aurait été de tester, mais je n'étais pas de ce bord là, sait-on jamais. Par contre, il est vrai qu'après réflexion, ma question avait du lui paraître des plus stupides.

Je ne fis rien d'autre qu'acquiescer à sa dernière question -oui, j'étais au courant- avant de venir m'asseoir sur la balançoire, sans plus aucune hésitation cette fois. Je réfléchissais, à vrai dire. Le silence s'installa, mais ça ne changeait pas beaucoup d'avant, à vrai dire. Je soupirais, retirant ma veste pour l'envoyer un peu plus loin au sol, dévoilant sans gêne les cicatrices que j'avais souhaité converser, le long de mes bras. Il pouvait toujours poser des questions s'il le voulait, et je pourrais être toute aussi franche que lui et l'envoyer sur les roses, ou alors lui demander le pourquoi il lui manquait un bras, au pire. Je n'avais rien à perdre. Une fois encore, je me mis à griffonner pour lui montrer à nouveau mon carnet.

« Donc, en clair, aucune chance de se faire attaquer, mis à part s'il y a des suicidaires qui veulent être effacés ? »

Je lui adressais un sourire, pour lui montrer que cette fois, la question n'était pas sérieuse. Même si, au fond, je venais peut-être bien de soulever une vérité. Qui viendrait tenter de m'assassiner en sachant que je reviendrais quoiqu'il en soit, et, qu'en plus, il risquait sa propre existence ? Je secouais la tête après m'être arrêtée sur la réponse "Personne". Puis, j'écrivais, à nouveau.

« Ça fait longtemps, que tu es à New-Life ? Est-ce que c'est normal que mes souvenirs d'avant s'effacent, peu à peu ? »

Je me posais encore beaucoup de questions, à propos de cet endroit. Je découvrirais sûrement les réponses par moi-même, avec le temps, mais l'amnésie qui s'insinuait dans mon esprit au fil des jours, des heures même, m'effrayait au plus haut point. Et je n'y pouvais rien.



Dernière édition par Raven le Jeu 17 Juil - 15:22, édité 1 fois
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Ruines. | Raven.
(Mer 16 Juil - 16:20)
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Ruines.
Bien sûr que si que tu peux être tuée. Par les gens qui n'ont rien à perdre.
Comme lui.

C'était vain. Personne ne gagnait plus le jeu, parce qu'en dix ans il n'avait jamais vu quelqu'un partir d'ici. Que des effacés. Des gens qu'on croise souvent sinon tous les jours et qui disparaissent. Comme ça. À commencer par ses voisins. En dix ans il y en avait eu, des écrans de fumée. Il y en avait eu des deuils silencieux. Quand tous les matins tu entends la voisine d'à côté chantonner Edith Piaf sous la douche, huit heures moins le quart, et qu'un matin tu n'entends rien, ni le lendemain, ni le surlendemain, et que tu comprends que sa neuvième tentative de suicide fut celle de trop pour le Game Master. Quand celui du dessus se fait gauler avec le cadavre d'un vivant dans son appartement. Ça, ça ne pardonne pas. Ces gens-là l'ont cherché, parce qu'au bout de dix ans, on sait qu'il n'y a plus rien à espérer sinon que l'éternité ne soit pas si longue qu'on veut bien le faire croire. Mais elle l'est, longue. Au-delà de l'imaginable.
Au-delà de tout.
Alors ce n'est plus la vie qu'ils cherchaient mais la mort, parce qu'ils n'ont que trop vécu en vain et la vanité épuise. Ils cherchent l'oubli, l'effacement, l'inconscience. Voilà tout. Bien sûr que l'on peut te faire du mal si cela sert nos intérêts, comme toujours, parce que l'humain est égoïste. Il n'y a pas de différence entre la vie et cette mort-là, sinon qu'en vivant on cherche à le rester et qu'en mort-vivant on cherche à mourir. Mais on est toujours prêt à tout pour ce que l'on veut. Toujours.

Ce serait si facile de la tuer. Pas de bruit, pas de suppliques, de protestation. Pas de remords à avoir puisqu'elle reviendrait et il n'avait qu'à recommencer, avec elle ou avec d'autres, les fantômes ne manquaient pas ici. Ce serait si facile. Mais il avait suffisamment tué de son vivant.

- Dix ans.

Pas un regard sur elle. Il se contentait de lire ce qu'elle écrivait, de déchiffrer la langue comme il le pouvait, mais il comprenait. En dix ans, on peut apprendre. On a plus que ça à faire.
Il la poussa avec le torse, dirigea la balançoire avec la main. Doucement.

- Et en dix ans, je n'ai jamais eu vent de la moindre amnésie. Pas due à la mort, en tout cas, et certainement pas progressive. Il y en a qui arrivent sans souvenir, sans doute après une mort avec trauma. Un choc à la tête. Mais pas d'amnésie post-mortem à retardement. T'es une première.

Peut-être que c'était mieux comme ça, après tout. Oublier. C'était ce qu'il cherchait à faire, ce qu'il avait cherché à faire pendant un temps. Le troisième temps. Le premier a été le déni, et pour cela il n'a obtenu aucun cadeau de la part du Game Master, pas même la possibilité de choisir son pouvoir. Non pas qu'on ne lui ait pas proposé, juste qu'il n'en avait rien à faire et qu'il cherchait à mourir. La première tentative de suicide l'avait mené à comprendre qu'il était bel et bien bloqué ici et il s'assagit, considérablement. Filer droit pour gagner une nouvelle vie. Et puis les effacements à répétition et le troisième temps, l'envie d'aller mieux, parce qu'il n'y avait qu'en réglant ses problèmes, en soulageant sa conscience que l'on pouvait gagner sa nouvelle vie. Et puisqu'il n'y avait aucun moyen pour lui de les régler autrement qu'en parlant à Jawal, il avait cherché à oublier.
Jamais il n'avait eu de souvenirs plus présent qu'aujourd'hui.

- Et j'espère sincèrement que ça pourra t'être profitable.

Ça peut l'être. Ça peut.

- L'amnésie est peut-être due à ton pouvoir, aussi. J'en sais rien.
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Ruines. | Raven.
(Mer 30 Juil - 19:07)
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Dix ans. C'est long, dix ans, dans une vie, et pourtant si court lorsqu'on est éternel. Je n'étais là que depuis quelques semaines, et pour moi la notion d'éternité paraissait tellement abstraite que je ne parvenais pas à l'imaginer. Que ressent-on, lorsque les années défilent sans nous emporter avec elles, lorsque le temps n'a plus aucune prise sur nous ? A quoi peut-on occuper des années entières alors qu'on en possède autant qu'on le désire, pourvu qu'on suive le droit chemin ? Quel intérêt y a-t-il encore à vivre lorsque l'on a vécu assez longtemps pour accomplir tous nos désirs et qu'il n'en demeure plus aucun ?

Et lorsqu'en plus tous nos souvenirs, tout ce qui fait de nous ce que nous sommes s'effacent et nous laissent démunis, que nous reste-t-il ? Comment peut-on encore vouloir vivre quand tout ce qui saurait nous permettre de trouver un rêve, un but, un objectif, tout ça disparaît ? Profitable. Peut-être, peut-être pas. Les regrets naissent des souvenirs, mais si je n'avais plus de souvenirs, regretterais-je de les avoir perdus ?

Je fermais un instant les yeux, sentant la balançoire bouger doucement, et moi avec. Je du malheureusement les rouvrir après un moment, pour écrire, regrettant amèrement de n'être pas capable de faire retentir le son de ma voix -que j'avais totalement oublié, d'ailleurs- afin de lui répondre.

« J'ai peur d'oublier. Ce sont nos souvenirs qui font ce que nous sommes. J'ai peur de m'oublier en oubliant mon passé. »

Je mâchonnais mon crayon, tic nerveux qui me prenait souvent, surtout quand je réfléchissais, ou quand j'hésitais à dire quelque chose. Ou plutôt à demander, dans le cas présent. Au final, qu'avais-je à perdre ?

« Comment t'es-tu occupé, pendant 10 ans ? As-tu encore quelque chose à perdre, toi ? Quelque chose qui te maintienne en vie ? »

Je paraissais tellement franche à l'écrit que je m'en surprenais moi-même. Et, quelque part, l'idée de sa réponse m'effrayait. L'idée qu'un jour, dans 10 ans, quelqu'un me poserait peut-être les mêmes questions. Que répondrais-je alors ? Serais-je encore là, d'ailleurs ? Ou alors, n'aurais-je moi-même plus rien à perdre, au point que je briserais les règles pour être effacée ? Serais-je lassée, désespérée, ennuyée, au point d'en arriver là ?

L'éternité commençait déjà à m'effrayer.


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Ruines. | Raven.
(Dim 31 Aoû - 15:51)
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Rebond.
Rebord.
La chaîne scintillait sous la lune, les tambours raisonnaient dans sa tête comme une meurtrissure profonde, des décharges contre ses tempes. Cadencés. Rythmés. La balançoire rebondissait contre son torse, le bras en guise de gouvernail, ça parlait de souvenirs et il se savait sur un fil. Un fil malheureux, un équilibre bancal, ça tangue à droite.
Ça tangue.

- Quand bien même tu oublierais celle que tu étais, tu auras de nouveaux souvenirs ici. Si tu as conscience tu as souvenir. Tu n'es pas morte ici, si tu as conscience de ce que tu fais, si tu fais encore quelque chose. Tu n'oublieras pas cette discussion. Tu oublieras ce qui t'a amené ici, ce n'est peut-être pas un mal.

Coup d’œil.
À son âge on n'est pas sensé mourir. À son âge on se contente de vivre, surtout quand on ne connait pas le monde et ses horreurs. Jawal ne vivrait jamais la vie qu'il lui souhaitait, Jawal était déjà mort. Jawal était loin et il était mort. Dix ans. Elle, elle n'était pas sensée mourir. À cet âge on ne meurt pas.

- Ce n'est sans doute pas un mal.

Tu oublieras une fille morte, tu oublieras une vie courte et sans doute peu d'événements, qu'ils soient bons ou mauvais. Tu oublieras une vie qui n'a pas vécu, tu oublieras un échantillon, un bourgeon, une expérience ratée, et tu pourras recommencer ici. La retrouver parce qu'elle n'est pas perdue cette vie, elle est en toi. Cette vie c'est la tienne, et tu peux l'oublier, elle est inscrite en toi. L'humain n'est pas fait pour perdre. Il avance.

- Ce que tu as à faire maintenant c'est avancer. Ce n'est pas en pleurant sur un passé de toutes façons révolu que tu grandiras. Occupe-toi, cultive-toi, éduque-toi, rencontre, partage, échange et avance.

C'est comme ça que je me suis occupé pendant dix ans.

- C'est ce que j'ai fais.

Et voilà ce que je suis devenu.
La haine.
Fais ce que je te dis mais ne me prends pas en exemple. Je n'ai pas même réussi à en être un pour mon sang. Pour ma chair.
C'est ma haine qui me rend vivant. Au fond tout est mort. Depuis longtemps.

- Et la seule chose que je pourrais perdre, c'est mon libre-arbitre.

J'ai perdu mon corps en voyant mon bras à un mètre de moi.
J'ai perdu mes proches en participant au charnier dans lequel ils se trouvaient.
J'ai perdu ma famille en m'y opposant.
Je n'ai plus grand-chose à perdre.
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